François "la trilogie"
A la demande générale, je me lance dans un compte rendu qui à défaut d’être exhaustif, sera, j’espère, à la hauteur de l’évènement vécu. Comment en effet relater en quelques lignes l’épopée (c’en fut une !) de Grandlieu VTT en terre Creusoise ? Comment retranscrire ces images, ces impressions, ces douleurs et ces joies qui se sont successivement bousculés dans nos têtes et nos corps meurtris ?
Aussi, d’une part, parce que je n’ai pas trop de temps, et d’autre part pour permettre à chacun de s’exprimer, commenter ou apporter quelques précisions, vous trouverez un compte-rendu en «
épisodes », relatant chaque journée ; original non ? (pour la fréquence, on verra !).
Prologue – "le calme avant la tempête"
Tout commence ce jeudi 29 avril ou trois groupes convergent avec allégresse et insouciance vers la Creuse profonde et un petit village dénommé Crozant que personne ne connaît : le 1er groupe à
arriver sur place est composé de Serge, Eric et Gilles (normal qu’ils soient les premiers à arriver vu qu’il y a Serge !) suivi de Caro, votre serviteur et Licinio environ une heure plus tard.
Ces deux groupes se retrouvant autour d’une bière (qui a dit 3 ?) au lieu dit
Eguzon, autre village typique à proximité de Crozant. Nous retrouverons le dernier groupe, arrivé entretemps ; groupe familial composé des Naveneau père et fils, François et Anthony.
Nous voyons déjà les prévoyants, ceux qui ont emmené le repas du soir, puisque nous dinerons ensemble, au camping de Crozant après avoir installé le campement, pendant que Serge et consorts
chercherons un resto (c’était pas gagné, on est en Creuse les amis!). Première rigolade au vue de la taille de la tente de Serge, de la niche devrais-je dire ! il nous avouera tout de même
que son lit de camp n’y rentre pas ! Grand luxe pour Eric et Gilles et originalité pour les Naveneau qui ont aménagé une berline (mégane je crois) en camping car !!! en démontant la banquette
arrière et en y plaçant un matelas double (on a des photos !). C’est pas les Saintes-Marie de la mer mais on s’en rapproche. En tout cas, François n’a pas amené de guitare, mais une bonne bouteille, qui sera apprécié à sa juste valeur pour
accompagner la salade de pâtes (déjà !).
Avec le retour de la bande à Serge, nous terminerons tranquillement la soirée à la frontale. Autre franche rigolade quand Eric sortira son duvet pour la nuit ; je crois n’avoir jamais vu un duvet
aussi fin ! roulé dans son sac il n’est pas plus gros qu’une cannette de bière ! (véridique). C’est pas un duvet mais un K-way ! bon courage Eric, j’espère pour toi que les gymnases seront
chauffés.
Puis les uns après les autres, tout le monde ralliera son nid douillet pour une dernière nuit au calme, seulement agrémentée du bruit… de la pluie sur la tente. Aïe ! espérons que ce ne soit
qu’un petit grain passager.
Le marchand de sable est passé.
A suivre….
Après un repos bien mérité, réveil le vendredi 30 avril, frais et dispo. Direction l’accueil pour le retrait des plaques et perception des consignes. Surprise : nous sommes « badgés » ! on nous passe un bracelet au bras avec le rappel de notre numéro de plaque ; interdiction de l’enlever, même sous la douche ! il nous servira de sauf conduit pour les repas à venir. En parlant de repas, direction une salle communale pour s’envoyer un plat de pâtes-jambon (à 10h00 c’est top !). Chargement des sacs, numérotés eux aussi, puis des vélos dans les camions. La tension de Serge retombe quand il s’aperçoit que les vélos sont protégés par d’épaisses couvertures molletonnées ; ouf, le BMC ne risque rien (sauf si la camion brule !). Embarquement des participants équipés dans les cars et direction Royère en vassivières où nous débarquons au bord d’un magnifique lac après 1h30 de trajet (nous mettrons plus de 16h00 à revenir, mais on ne le sait pas encore !).
Au débarquement on récupère les bikes, encore tous beaux et propres. On sent l’effervescence et l’excitation qui augmente avec l’approche du départ, fous que nous sommes devant l’ignorance.
Là, on commence à se rendre compte qu’il ya du beau monde et de belles machines. Les Belges sont visiblement venus en force ; plusieurs team sont présents, dont un, fort bruyant, composés d’une vingtaine de membres. Eric nous fait d’ailleurs remarquer que dans une autre équipe il y a la championne de Belgique, rien de moins ! respect. Il faut effectivement préciser que nous sommes encore mélangés avec les compétiteurs aux plaques rouges (nous avons les bleus…logique !). Bref nous ne jouons pas vraiment dans la même catégorie ; d’ailleurs eux, ils ne jouent pas du tout et on s’en rendra vite compte.
L’heure approche, dernières vérifications, consignes du directeur de course, les plaques rouges devant et…c’est parti pour les premiers 55 km et leurs 1300 mètres de dénivelés. A peine quelques centaines de mètres plus loin arrêt obligatoire pour passer un par un sur une passerelle qui enjambe une rivière en furie. On appelle ça une « zone d’éclatement » paraît-il. C’est vrai qu’après, le trafic est beaucoup plus fluide et nous ne reverrons plus de rouge avant l’arrivée.
C’est donc toujours enthousiastes et gonflés à bloc que nous enchainons les kilomètres de sentiers et de chemins et que l’on commence à comprendre que ce ne sera pas qu’une promenade de santé. Si le parcours, à de rares exceptions, ne présente guère de difficultés pour des vttistes aguerris comme nous ! il faut noter une particularité locale et vérifiée durant ce week-end : ça monte toujours !
Sur cette première étape, nous avions décidé de rouler grouper et de nous attendre, la consigne sera tenue et même si la file s’allonge de temps en temps, les beaux maillots de Grandlieu formeront un beau groupe d’ailleurs remarqué, non sans une certaine fierté, par l’organisation qui aura toujours un petit mot sympa pour nous aux arrivées (si, si, on aura même droit au micro, d’où l’intérêt de porter les couleurs du club).
Un petit mot d’ailleurs sur l’organisation qui sera globalement au top (sauf sur un coup arrivé à l’un d’entre nous sur la 2ème étape ; je vous laisse saliver, ce sera pour…plus tard), les ravitaillements sont complets et variés (2 sur le 55 km) avec sucré et salé. Le fléchage impressionnant de rigueur et de précision (à la vitesse où vont les coureurs, le nez dans le guidon, vaut mieux), à chaque intersection, une à deux personnes bloquent la circulation, bien qu’il ne passe qu’une voiture par mois !). On croise souvent les motos tout terrain de l’organisation qui font de réguliers allers et retours sur les chemins (surtout en queue) pour voir si tout va bien. On deviendra presque intime avec François (encore un !) le vttiste de l’organisation qui est chargé de…fermer le circuit en s’assurant qu’il n’y a pas de naufragé et qui met la pression au dernier.
Bref, tout se passe le mieux du monde, et c’est toujours dans la bonne humeur que nous enchainons montées, grimpettes et…montées ! il y a bien de temps en temps quelques descentes (superbes) mais hélas, toujours trop courtes et systématiquement suivies … d’une montée (c’est bien les gars vous suivez).
Inutile de dire que le parcours est digne des plus belles randos de chez nous, cette région est vraiment la Mecque du sport de nature et les paysages sont magnifiques, surtout, quand après être bien grimpé on se retrouve au sommet des collines (souvent) avec une vue dégagé sur des immensités vertes. On se sent vraiment en communion avec la nature et rouler dans ces conditions est vraiment un plaisir.
Puis, finalement, à force de rouler, nous finirons par atteindre Bourganeuf, terme de cette 1ère étape avec une arrivée, naturellement en montée, mais super idée, sur la place de la ville entre deux rangées de barrières sous les encouragements du speaker (merci les maillots !).
Au bilan : les 8 GLVTT sont présents ; sans bobo ni problème mécanique : super.
Après un petit en-cas au ravitaillement de fin, plus qu’à remonter sur les vélos ! pour rallier quelques centaines de mètres plus loin notre lieu d’hébergement, à savoir comme prévu, le gymnase local.
A noter tout de même que le nettoyage des vélos n’est pas terrible, attente (on reviendra plus tard) et pression dans les tuyaux de type « pissette » ; de plus seule Caro a penser à prendre une brosse de nettoyage ! (intuition féminine ?).
Nous prenons donc place dans notre chambre de 200 places où seuls nos sacs trônent encore à l’entrée en attendant leurs maîtres. Serions-nous dans les derniers ? Bon là, ce qui n’est pas terrible, c’est que le gymnase étant un poil juste, nous ne pourrons pas nous regrouper tous ensemble et prendrons par petits groupes les places disponibles ; faudra rouler plus vite ! Sinon pour les douches et sanitaires, comment dire, c’est ... un gymnase ! douches collectives (tout le monde à poil !) et UN ch…

Encore deux bons points à souligner : la présence d’un stand de dépannage où un professionnel diligenté par l’organisation s’attache à remettre en état les vélos qui en auraient besoin (il me semble que seul Licinio ira y faire un tour), et le fait que le parc fermé sera gardé la nuit par une charmante dame « vigile » accompagné de deux gentils toutous. On nous prévient qu’à la nuit tombé, les chiens sont lachés ! en clair, inutile de vouloir vérifier quelque chose sur le vélo la nuit à moins de vouloir perdre un bras ! rassurant ; nous pourrons dormir sur nos deux oreilles.
Point négatif : il manque les masseuses pour (dé)tendre nos muscles endoloris.
Avant, direction le collège du coin où le self est mis à notre disposition pour un diner bien mérité à base de pâtes et de poulet.

Les kilomètres sont désormais oubliés (bien qu’une partie de nos corps nous rappelle tout de même les heures passées sur les selles), les pilotes sont détendus, propres et rassasiés ; y a plus qu’à se laisser glisser dans les duvets et sombrer lentement dans un doux sommeil rempli de sentiers qui montent.
La nuit sera calme, seulement ponctuée de quelques ronflements de ci, de là, mais rien de bien grave.
Demain sera …un autre jour !
7h00 : ça commence à bouger dans la « chambrée », le réveil s’étalera tranquillement jusqu’à 7h30, puis après une courte ballade matinale qui achèvera de nous réveiller, direction le collège pour un petit déjeuner sur lequel il convient de ne pas faire l’impasse, tout le monde ayant conscience (pas totalement) du plat de résistance qui nous attend aujourd’hui : 75 km (de montée !) pour 1900 mètres de dénivelé ; les connaisseurs apprécieront !
La nuit fut tout de même bonne et réparatrice, les esprits oublient vite, les corps un peu moins mais globalement tout le staff est en forme et prêt à en découdre avec les chemins. Le départ n’étant prévu qu’à 10h00, nous avons largement le temps de replier le camp, charger les sacs dans les camions et attendre en bichonnant nos vélos.
Dix minutes avant l’échéance, départ groupé vers la ligne de départ qui aura lieu, en contrebas, sur une esplanade dégagée, où s’effectue, entre deux rangées de barrières, la mise en place des compétiteurs dans l’ordre de leur arrivée de la veille : très pro.
Ah, il ne faut pas prendre à la lègère les consignes de la journée qui nous mettent en garde sur le final ! en clair gardez en un peu sous le pied pour arriver à Gueret.
Déjà, les plus perspicaces (ou inquiets !) auront remarqué que pour rallier la zone de départ nous empruntons une descente de ouf, certes sur le bitume, mais une sacré descente avec un pourcentage à deux chiffres. Or, dans le sens où nous sommes placés, la seule issue visible c’est justement cette descente qui, du coup, devient…une montée terrible (c’était l’idée du jour pour ces fameuses zones d’éclatement). Le matin, à froid, c’est génial.
A peine le temps de grimacer et, pan, le départ est donné. Pour l’arrivée, on verra plus tard…beaucoup plus tard !...
On attaque donc avec le petit plateau, inutile en effet de se cramer dès le départ ; on a rien à prouver, sauf à tenter d’aller au bout. A mi-montée un gars devant nous explose littéralement son axe de roue arrière dans un grand craquement. Fin de la rando ! les boules ! Pour nous, ça roule et s’enchaînent à nouveaux les montées, les sentiers, les montées, les chemins…les montées ! les kilomètres s’égrènent, lentement, toujours dans un cadre magnifique sur lequel je ne reviendrai pas et qui plus est, comme hier, sans une goutte de pluie : merci à vous Dieux Creusois.
Tout se passe donc bien et le premier ravitaillement pointe son museau sucré. Là, on se rend compte que ces premiers 20 km ont réveillés quelques douleurs disparues durant la nuit : les mollets commencent à durcir et on est bien au courant quand le fessier est au contact de la selle ; ça promet, il va falloir gérer ces petites douleurs !
Certains commencent à se rendre compte qu’il reste quelques 55 km, dans les conditions que vous savez (les montées) et qu’à la vitesse où nous roulons…on n’est pas couché ! et là c’est le moral qui est atteint. Eric commence à pester sur les montées et des questions se posent aux esprits chagrins : la mutinerie guette. Capitaine Serge, resserrer vos rangs !
Bon, dans l’immédiat, pas le choix, faut repartir. Après tout c’est quand même notre passion et notre plaisir, alors profitons en !
Et là, j’attaque la délation du jour (ah ah) : donc les rangs de Grandlieu vtt commencent à se clairsemer et le groupe, toujours complet à s’étirer. Nous roulons de concert avec Serge dans le groupe de tête (Gilles est surement déjà devant), avalant ces interminables montées d’un rythme régulier, mais en en chiant quand même, quand tout d’un coup, presque arrivée au sommet, une voix connue venue de derrière nous lance : « il a fallu que je mette un bon coup de pédales pour vous rattraper, mais ça y est je recolle ». Eric, dans une forme éblouissante, semble-t’il nous a rejoint comme une fleur ! on se regarde incrédule avec Serge, en se demandant intérieurement ce qui nous arrive ! Et là, le bougre se livre : monsieur a fait du moto stop ! il a réussi à trouver un motard compatissant qui l’a accroché et c’est sans un coup de pédale qu’il a doublé tout le monde pour se faire lâcher derrière nous, tant qu’à faire au sommet ! j’y crois pas le traître ! mais bon, on continue à rouler, en redistançant à nouveau Eric au fil des kilomètres, pour finir par le perdre de vue.
Nouvelle montée et nouveau coup d’éclat du fourbe qui réédite son méfait (vraiment sympa le motard, ou alors c’est de la pitié), on se dit que 75 bornes comme ça, il va être frais comme un gardon le Eric. Par contre nous…
Une montée plus loin, le bruit de la moto derrière nous, on se dit avec serge que si Eric est là, on lui crève les pneus ou on lui jette des cailloux

Et nous continuons, imperturbables, tels des galériens du crampon, pour voir enfin, pointer un instant de délivrance : le 2ème ravitaillement mais seulement 38 km au compteur ! il en resterait donc encore 37 !
La révolte qui grondait éclate ; réunion au sommet : des voix s’élèvent et les uns après les autres les hommes désertent ! Caro la première pense que si elle continue comme ça, elle sera incapable de repartir demain, crédo repris en chœur par the Naveneau family et Eric qui ne trouve plus de moto disponible !
C’est donc le cœur gros que nous laissons nos camarades derrière nous, toutefois entre de bonnes mains et sûr de ne pas les voir mourir de faim puisqu’ils feront la tournée des ravitaillements avant de rentrer.
GLVTT se résume donc à cette heure de Gilles, toujours frais, de Licinio régulier, de Serge et moi-même décidés à aller au bout.
Et c’est reparti avec une partie de nos corps qui devient de plus en plus douloureuse ! (pourtant le cuir devrait être tanné !). Gilles égal à lui-même est toujours fringant, nous un peu moins, et ainsi au fil des singles et autres montées, les maigres rangs s’étirent à nouveau : on n’ose plus s’arrêter de peur de ne plus repartir et l’on admire à peine ces magnifiques paysages qui nous entourent mais qu’il faut mériter.
Enfin, oh joie, le 3ème ravitaillement se profile à l’horizon, comme une oasis tant attendue par les naufragés du désert vert que nous sommes. Abondance de victuailles sur lesquelles nous nous jetons sous les regards compatissants de notre fan club, qui fait le tour des popotes avant de rentrer ! les encouragements de nos amis qui commencent à se refroidir nous réconfortent.
Les minutes passent et toujours pas de Licinio ! aurait-il eu quelque problème ? nous décidons de continuer, il reste encore 18 bornes à se taper, et autant 18 bornes à St-Phil ça peut faire sourire, ici, après 58 km au compteur ça devient « voyage au bout de l’enfer ». Quant à Licinio, nous ne sommes pas trop inquiet, l’organisation semble bien rodée pour rapatrier les brebis égarées (motos, fermeur, camion…)…mais, des fois tout ne se passe pas exactement comme on le voudrait !...
Pour nous, les chemins s’enchaînent à nouveau et les kilomètres défilent lentement. Gilles s’est laché, laissant les deux vieux faire ce qu’ils peuvent, et on ne le reverra plus avant l’arrivée (c’est beau la jeunesse !). Allez courage, on passe le cap fatidique des deux chiffres au compteur (moins de dix km), on sait que maintenant, sauf problème mécanique on ne lâchera pas ? J’avoue que je commence à ne plus avoir de jus et dit à Serge de ne pas m’attendre, je finirai à mon rythme, qu’il peut y aller s’il veut. Mais solidaire (ou également cramé ?) il restera à mes cotés jusqu’au bout, merci Serge (le vélo c’est comme l’amour, c’est mieux à deux !).
Plus que 5 km, ce n’est rien, et pourtant ! le final aura été à la hauteur de ce qui nous avait été dit : terrible !
On approche, la civilisation réapparait petit à petit, et enfin, au détour d’un chemin, sortie sur le bitume et enfin le panneau salvateur : GUERET écrit en noir sur fond blanc cerclé de rouge : merci la DDE, je m’arrêterais presque pour l’embrasser ce panneau.
Donc le panneau devant nous, et la ville juste derrière ; alors pourquoi diable les flèches nous indiquent la gauche ? et en plus en montée ?
Nous mettons le doigt sur la perversité des organisateurs qui nous envoient faire le tour d’une colline boisée ; nous sommes sur le bitume et je la sens mal cette colline (qui à ce moment me semble aussi haute qu’une montagne) qui nous tend les bras, je fais part de mon inquiétude à Serge « tu vas voir qu’ils vont nous y envoyer avec près de 75 bornes au compteur les s… » . Évidemment ça n’a pas loupé, pourtant qu’est ce qu’on était bien sur le bitume. Donc d’un coup, vlan, flèche à droite vers le néant vert avec passage sur une palette pour enjamber le fossé et à l’attaque de l’Everest local, l’arrivée, enfin, ayant lieu au sommet de la dite colline, sur les hauteurs de Guéret.
Nous passons sous l’arche gonflable du conseil général avec les encouragements du speaker reconnaissant les valeureux guerriers de Grandlieu VTT et sous les félicitations de nos collègues présents. Le temps de poser les vélos et nous nous jetons sur le plat de pates proposé que nous dégustons avec vérocité assis dans l’herbe (beaucoup plus tendre que nos selles !). Il est 16h30 et nous avons quitté Bourganeuf à 10h00 ; je vous laisse faire le calcul. Je ne peux m’empêcher de dire à Serge qu’à 20h00 je serai couché !
Quelques instants plus tard, Caro, voyant l’organisation commencer à remballer le matériel, a un gros doute : où est donc Licinio : pas vu passer le dernier ravito, pas dans le camion balai et pas à l’arrivée ! Le temps d’alerter l’organisation et son téléphone sonne : c’est notre égaré qui communique sa position !
En fait, nous apprendrons que, quelques kilomètres avant le dernier ravitaillement il fut rattrapé par François, le « vtt balai » qui l’a attaqué au moral : « tu devrais abandonner, à cette vitesse t’es pas rendu, pense à demain, et puis les km qu’il te reste à faire sont les plus durs… » tant et si bien que notre ami finira par jeter l’éponge et décidera d’attendre le camion avec un collègue de galère auquel il manque un quart des rayons sur une roue ! 3 heures qu’ils attendront, transis de froid, avant de trouver un portable qui passe (rappeler vous, on est en Creuse !). Soi-disant le camion ne les a jamais trouvé ! à priori problème de communication entre François et l’organisation ! sur ce coup, pas très pro. Mais bon, au vu du reste, on pardonnera.
Entretemps, pour nous, nettoyage des vélos, puis douche bien chaude (quel bonheur !). Ce coup-ci le campement est super bien installé et nous sommes tous ensemble (merci les abandons) autour d’une cage de hand dans un gymnase plus grand que la veille et beaucoup plus agréable : tout un coté est entièrement vitré et donne sur la nature. Sympa.
Les Naveneau, toujours les rois de la débrouille, pour éviter de jouer du gonfleur, iront piquer un…tapis de saut en guise de matelas ! avec 40 cm d’épaisseur, c’est du grand luxe.
Pour nous, les tapis de gym suffiront à notre bonheur.
Par contre, les ch… à la turque ! pas top. (si si je vous assure !) ; c’est vraiment « sauvage » le coin, on est bien loin de Nantes !
On retrouve aussi notre copine et ses cerbères

Et gros plus par rapport à hier, il y a un bar au sein du complexe sportif, nous pourrons ainsi écluser avec délectation une bonne bière fraiche, dans une chaude ambiance à connotation Belge, avant d’aller nous restaurer au collège du coin, réquisitionné pour l’occasion. Louable attention, il y a des brins de muguet sur toutes les tables, c’est vrai que nous sommes le 1er mai ; à vrai dire personne n’y avait prêté attention. Nous sommes à l’écart du monde !
C’est le ventre plein que nous quittons le self et que nous constatons, amusés, que le collège propose, à ses élèves, le choix entre 2 activités sportives : football (incontournable) et…VTT ! Quand t’es prof de gym et que tu demandes ta mutation dans le coin, t’as intérêt à avoir la forme ; préretraités s’abstenir ! le secteur c’est pas le marais poitevin !
Enfin retour au Gymnase-dortoir, puis après avoir vérifié une dernière fois que personne n’est a plat (je parle des vélos), direction le duvet, oh combien mérité. Quand je disais que j’y serais à 20h00, j’ai un peu exagéré, je ne me coucherai qu’a…20h30 ! et dormirai à 20h35 pour un bon sommeil réparateur

La nuit est paisible, à priori tout le monde a besoin de récupérer, seules s’entendent les respirations tranquilles des participants, quand, doucement quelques frémissements se font entendre et une lumière s’allume dans le gymnase ; serait-ce l’heure de se lever ? je regarde ma montre, eh oui, il est déjà …5h30 ! (vous avez bien lu !) faut vraiment être taré pour se lancer dans une telle aventure !
Nous remuons nos corps endoloris et afin de ne pas trop attendre au self, affrontons la nuit noire et froide pour nous diriger vers le collège d’hier soir. Nous terminons de nous réveiller autour d’un bon petit déjeuner en pensant à cette dernière ligne droite qui nous attend pour rallier Crozant, terme de cette quête. (quand je dis ligne droite ! façon de parler.).
Bref passage obligé chez les turques, histoire de s’alléger avant le départ. Y a pas, c’est encore le moyen âge ici ! on s’attendrait presque à voir surgir Petit Gibus de la guerre des boutons ; pour sûr, il ne dépareillerait pas dans le contexte.
Sur le chemin du retour nous croisons notre gentil organisateur en chef à qui nous posons quelques questions : « ne vous inquiétez pas (ben voyons), rassemblement devant le gymnase à 7h30 puis départ groupé pour rejoindre la vrai ligne de départ 4 km plus loin, à l’extérieur de Guéret » Bien évidemment ces 4 km ne comptent pas dans les 55 prévus et pour nous rassurer « ce sont 4 km de descente ! ». sceptiques nous continuons pour assurer une dernière fois le ramassage des affaires et les derniers préparatifs. Ok, tout est dans le camion, nous sommes sur le lieu de rassemblement, il fait nuit, froid et comble de bonheur, il se met à tomber une P… de petite pluie fine : génial. J’en tremble de joie.
En attendant ce premier faux départ les furieux aux plaques rouges, bras nus ! tournent comme des fous autour de l’esplanade pour se préparer ; ils nous donneraient presque le tournis !
Allez, c’est parti, cool derrière les motos qui font des aller et venus pour bloquer la circulation aux intersections de la ville que nous traversons (tu me diras, la circulation à guéret un dimanche matin pluvieux à 7h30 !!!).
C’est tout de même impressionnant ces 200 vttistes, groupés en peloton, traversant une ville endormie. Nous, on s’en rend bien compte, parce que les 200 en questions sont devant nous ! Sinon, le G.O., il ne s’est pas foutu de nous : c’était bien 4 km de descente ; ce qui vous laisse imaginer de la géographie locale ! Pour se réchauffer par contre, c’était pas top. On attend le départ, sur une petite route de campagne ; j’ai froid, ma combine de pluie dégouline, le cuissard s’humidifie ! Qu’est ce qu’on fout là ? à ce moment j’envisage sérieusement, pour l’année prochaine, de me mettre à la peinture sur soie ou au macramé ; ça doit être bien aussi, devant un poêle bien chaud, un chat sur les genoux.
Pan ! je sors de ma torpeur et de mes songes et ce coup-ci c’est parti pour les derniers 55 km. D’après les consignes, le final est magnifique, les 25 premiers km sont roulants et les 30 derniers …un peu moins ! Maintenant, je ne peux éviter de m’interroger : qu’est ce que « roulant » signifie dans le langage local ?
Ce coup-ci, pas de zone d’éclatement à la c…, juste une route bitumée, normale, plate ! on cherche le piège, inquiet, mais rien ne se passe ! ça roule. Bon ! tant mieux. Pour le dernier jour, les consignes de Grand Lieu étaient simples : chacun pour soi et on se retrouve à l’arrivée. Comme ça, chacun va pouvoir se tester et gérer au mieux ces derniers 55 km. Je ne suis pas trop inquiet pour Gilles que l’on verra disparaître dès les premiers km : vas-y Gilou, éclate toi !

Grand bonheur, la pluie s’arrêtera au bout d’un petite demi-heure pour ne plus réapparaître jusqu’à l’arrivée ; on aura même droit à quelques rayons de soleil : le moral remonte !
Encore une fois, Grand Lieu va s’étirer doucement, de petits groupes de même valeur se formant au gré des chemins. On constate que les Naveneau sont en forme, ils vont même assurer une première partie, jusqu’au premier ravitaillement en leader (excepté Gilles bien sûr !). Serge dit que c’est normal, cette première partie ressemblant grosso modo à ce qui se fait chez nous ; attendons la suite (rappelons qu’il y a quand même encore 1300 mètres de dénivelé à se taper !). Bref tout se passe pour le mieux et nous nous retrouverons tous au premier arrêt restauration : déjà 20 km de fait, et c’est vrai, sans difficultés particulières, si ce n’est les inévitables grimpettes.
On repart donc tranquille, à peu près dans l’ordre d’arrivée, sans trop trainer quand même, comme la veille, nous roulons de concert avec Serge. Il fallait quand même prendre note des conseils de prudence prodigués à chaque arrivant, par la tenancière du ravitaillement « faites attention, en repartant, en bas de la descente, il y a des gros cailloux, le chemin est difficile ». Effectivement, Serge en fera l’expérience ; personne ne dicte sa conduite à Serge le fougueux ! et quand tout le monde descend à pied, lui descend sur le vélo…avant de descendre du vélo de manière plus…brutale ! mais ça va, pas de bobo ! de toute façon, il fallait traverser une rivière à pied et remonter sur la route de l’autre coté en escaladant littéralement 5 mètres de talus, et quand je dis escalader, c’est le terme qui convient. Donc ça y est, la trêve des confiseurs est terminée, on attaque la deuxième partie décrite par la direction de course, où on va retrouver des passages, certes magnifiques, mais ou le palpitant passe en zone rouge et ou les cuisses sont en acier chauffé à blanc. Quant au c…, on n’en parle pas ! Mais bon, on était prévenu !
Tout ça nous emmène au 2ème, et dernier, ravitaillement ; nous sommes restés ensemble avec Serge, roulant tous deux sur le même rythme et Anthony et François que nous avions doublé depuis un bon moment, arrivent juste derrière nous à 1 ou 2 minutes seulement. Respect ! Bien sûr avant d’en arriver là, il a fallu gravir quelques spécialités locales, mais on finit par s’y habituer ! J’en ai quand même encore une ou deux bien présentes dans ma mémoire (et mes mollets !).
Après s’être bien rassasié et reposé quelques instants (on apprend vite à ne pas faire l’impasse sur le ravitaillement !) nouveau départ et à ce moment, on oublie un peu la fatigue accumulée ces derniers jours et l’on se dit que, sauf pépin mécanique, on la finira cette GTL : le Limousin n’a qu’à bien se tenir, GLVTT arrive. Alléluia !
Et ça continue encore et encore ; nous reviennent à l’esprit les saintes paroles de ce matin, à savoir « la fin est plus dure » et puis après quelques kilomètres, au détour d’un chemin « le final est splendide ! ». là, c’est le flash, on en prend plein les yeux ! on n’est plus en Creuse, on est dans les gorges de l’Ardèche ! incroyable ! Nous longeons une rivière magnifique, la Creuse bien nommée, parait-il ! mais peu importe.
Nous roulons pendant des km sur des singles en sous-bois qui se perdent sur les berges, en face, c’est un versant de rochers et de falaises qui se jettent dans la rivière. Nous passons au bord de plages de sable blanc ! on a quitté l’Ardèche pour les Seychelles !

Enfin bref, vous l’aurez compris ; c’est simplement génial !
J’aurais bien continué comme ça jusqu’à l’arrivée mais la réalité nous rattrape ! je me doutais bien que ça ne pourrais pas durer éternellement, il reste encore plus de 10 km à se taper ! aussi, bien que le sentier continue au niveau de la rivière, une flèche traitresse nous indique la droite ! et à droite c’est un versant pentu de chez pentu ! de type himalayen. Le sentier se perd dans les hauteurs ! la messe est dite : ce sera pied à terre et même comme ça on en ch… grave ! puis ce sera une progression à flanc de colline boisée, super mais technique cette succession de montées et descentes, nécessitant d’incessantes relances et de montées en régime cardiaque. Mais franchement ça en vaut la peine.
On enchaine les sous-bois quand au détour d’un chemin, sur une hauteur (évidemment !), on perçoit dans le lointain de la musique et la voix d’un speaker ; c’est sûr, c’est pour nous ! l’heure de la délivrance approche ! coup d’œil au compteur ; les 50 bornes sont passées, il doit en rester à peine 4 ou 5. En temps normal de la rigolade, mais n’oublions pas la perversité des organisateurs et la géographie locale.
Effectivement, la musique disparaît, elle qui semblait si proche il y a seulement quelques minutes, et comme à Guéret, nous semblons à nouveau tourner le dos à la bonne direction. On est habitué, on ne râle plus ; les flèches sont toujours là, donc, imperturbables nous les suivons et attaquons le final ; et quel final ! à l’image de tout le reste, grandiose et dantesque ! descentes d’enfer, remontée du même type, beaucoup de passages techniques avec grosses pierres infranchissables, souvent obligés de se mettre au pédestre.
53 km. A nouveau la musique, on attaque une montée terrible avec grosses plaques rocheuses à franchir et tout à coup, au sommet, une trouée dans la forêt et nous sommes au sommet avec une vue à couper le souffle sur les méandres de la Creuse que surplombent les ruines du château de Crozant, terme de notre périple. On distingue même (au loin) le vert criard de la structure gonflable d’arrivée.
Tout va bien, pensez-vous ! c’est terminé pour nos valeureux croisés.
Que nenni mes braves ! explications : quand nous débouchons sur cette trouée de forêt, au sommet d’un piton rocheux, il n’y a entre nous et l’arrivée que quelques centaines de mètres…à vol d’oiseau, et que je sache, malheureusement nos vélos ne volent pas encore.
Donc, pour voir nos noms gravés à tout jamais dans le marbre creusois, il va nous falloir descendre de notre promontoire (bonjour la descente !) jusqu’au niveau de la rivière, traverser celle-ci sur le pont qui l’enjambe et attaquer la DERNIERE montée vers les hauteurs de Crozant (l’arrivée étant bien sûr, situé au point le plus haut du village !).
Nous voila donc, tous les deux, avec Serge, sur le bitume (que c’est bon !) moulinant tranquille en enchainant les derniers virages de cette randonnée mythique. Il doit rester 200 mètres, le dernier virage est là, on en pleurerait presque, quand un commissaire nous fait signe de prendre à droite, ce chemin, impraticable, avec de grosses marches ! pas le choix, faut escalader à nouveau ! on débouche sur une travée étroite, puis un escalier !!, on passe sous un porche et elle est là, devant nous, l’arche d’arrivée : sonnez tocsins, résonnez hautbois, nous y sommes, et nous franchissons la ligne d’arrivée ensemble avec Serge, main sur l’épaule l’un de l’autre ; ça peut paraître puéril, mais nous sommes tellement heureux que nous exprimons ainsi notre joie et quelque part, notre fierté de l’avoir fait (le premier qui rigole se prend une baffe !).
Comme dirait l’autre, Veni, Vidi, Vici (pour les incultes : « je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu »).
Nous avons été accueillis, une fois de plus, sous les félicitations du speaker, qui aura bien mémorisé nos couleurs durant ces trois jours.
A peine le temps de savourer cette victoire sur nous-mêmes que nous nous jetons sur la nourriture et la boisson afin de récupérer un peu de l’énergie dépensée. Quelques minutes plus tard débouche François, tout heureux d’arriver avant le fiston qui suit à une minute derrière (en pleine forme l’ancien ! mais paraît-il, il aurait profité d’un incident technique pour griller la politesse au petit jeune juste avant l’arrivée. Ca se règlera en famille !).
Retour sur terre ; en attendant le reste des troupes, direction le camping pour le démontage des tentes, rapprocher la voiture pour charger les sacs arrivés bien avant nous, et être prêt à monter les vélos. A cet instant arrivent Eric, caro et Licinio, le sourire aux lèvres, eux aussi heureux d’en avoir terminé. Finalement tous les membres de Grandlieu VTT auront terminé, à force de volonté et de courage (c’est beau, n’est ce pas !).
On retrouvera bien sur Gilles, arrivé depuis fort longtemps et prêt à repartir s’il le fallait ! la prochaine fois faudra lui couler du plomb dans son cadre pour qu’il aille moins vite !
Mention spéciale pour Licinio qui fera la moitié de l’étape… sans frein arrière ! Ce n’est pas une image, le disque, ou plutôt ce qu’il en reste, se trouve dans son sac ! j’avais encore jamais vu ça, il est tordu en huit ! (essayez de tordre un disque de frein à la main, c’est impossible !). En fait, il semble que les fixations se soient desserrées ! et lors d’un freinage appuyé, les vis se sont cisaillées, et quelques filetages du moyeu arrachées. Le disque est passé je ne sais ou pour le résultat que l’on voit. Bien sur, blocage instantané, gamelle dans la foulée en emmenant dans la chute le pauvre Eric qui n’en demandait pas tant.

Je disais donc mention spéciale, car finir le circuit sans frein arrière, chapeau ! Caro me disait qu’il se lançait quand même dans les descentes comme ça ! courage ou inconscience ? en tout cas respect ! (au fait il devait être content le gars qui t’a prêté le vélo ?)
Sur ce, le temps passe, il est temps de prendre une douche bien méritée, d’enfiler une tenue civile propre et de se diriger vers le chapiteau pour le repas de fin, trop vite avalé pour cause de planning à respecter.
Nous nous séparerons chaleureusement, chacun reprenant son véhicule chargé pour prendre la direction de l’ouest vers un retour à la civilisation. Un coup d’œil dans le rétro, et je me rends compte que j’ai une tête pas terrible avec une barbe de trois jours ! les corps se détendent, ceux qui ne conduisent pas se laisseront sombrer dans une douce quiétude, la tête pleine de ces trois journées vraiment exceptionnelles que nous avons tous vécu hors du temps. C’était dur, mais nous en garderons de bons souvenirs…jusqu’à la prochaine ?
Voila mes amis, ici se termine la quête des 8 valeureux guerriers GLVTT en pays Creusois :
- Gilles la bête
- Serge le fougueux
- François le narrateur
- François l’ancien
- Anthony la débrouille
- Caro la valeureuse
- Eric le râleur
- Licinio la guigne




